Le thème du livre a été fourni par Balzac lui-même, qui s'était promis de traiter cette défaite napoléonienne et "d'initier [le public] à toutes les horreurs, à toutes les beautés d'un champ de bataille". Mais n'ayant pas eu le temps d'en écrire une ligne, Rambaud a décidé de prendre la relève. Un objectif finalement assez ambitieux...

La bataille d'Essling en Autriche, de Napoléon, par Patrick Rambaud,

Il s'agit de la première défaite napoléonienne : 40 000 morts en 30 heures, un carnage.
S'il faut réduire Patrick Rambaud, l'auteur d'une fameuse tétralogie romanesque consacrée à Napoléon Ier, au motif de son oeuvre, ce sont les deux pointes du bicorne qui dans l'esprit se dessinent. Mais est-ce bien là réduire, quand le galurin du général qui devint empereur à force d'intrigues, s'y dessine si nettement ? Quand, à l'occasion de 'La Bataille', d'illustres immortels lui décernent leur Grand prix du roman ? Quand l'académie Goncourt accueille en son sein le pasticheur ? 74

"Je me suis aperçu que ce Bonaparte deviendrait le modèle de tous les grands personnages de romans du XIXe siècle. C'est à la fois Rastignac, le Bel Ami de Maupassant, qui veut arriver par les femmes, ou c'est Julien Sorel", explique l'écrivain.

Napoléon, Un héros pré-romantique à la poigne de fer dont il nous conte les aventures les moins reluisantes ou les heures creuses dans 'L'Absent'. Brossant au passage les portraits d'anonymes de l'Histoire qui en leur temps croisèrent la route du souverain, esquissant les ruelles du Paris de la fin du XVIIIe siècle, survolant les champs de bataille d'Essling, remontant la Bérézina ou arpentant les falaises de l'île d'Elbe. Et même s'il s'en défend, Patrick Rambaud trouve en la matière du tyrannique empereur des Français prétexte à fouiller l'Histoire, comme tout bon livre sur Napoléon ... La figure mythique a même accouché, dans son esprit éclairé et volontiers satirique, d'un autre aiglon à qui il prête, dans ses 'Chroniques du règne de Nicolas Ier', les traits de Bonaparte - sa gouaille comme son ambition.

Dans l'ombre du "chapeau bras", si commode qu'on l'aplatit pour l'emporter partout, l'écrivain assemble les faits de gloire ou de défaite et les détails de son cru sans ménagement pour l'étiquette. Il compose alors des récits captivants, drôles, enlevés, qui ressuscitent le passé avec autant d'égard pour la véracité que ceux qui en leur temps l'enjolivèrent par déférence. Et quel que soit le chef qu'il couvre de son bicorne, c'est à sa tête bien faite que l'on doit d'excellentes relectures de l'histoire de France.